07 avril 2006

Chrétiens anonymes - III

Si les païens sont sans loi, la loi est parfois inscrite en leur coeur. C'est en tout cas ce qu'affirme Rm 2,14s : "ils montrent que la loi est inscrite en leur coeur...". Cela doit être ce que l'on appelle la loi naturelle. Il n'y a donc pas que saint Justin qui évoque cela... Et cela permet de percevoir (sans être rousseauiste et croire que l'homme naît bon, en soi) que l'homme naît libre et qu'au sein de cette liberté, il peut trouver en lui (et dans les autres) la ressource nécessaire pour exercer sa propre liberté.

4 commentaires:

Anonyme a dit…

Bravo pour l'ensemble de ce blog. Je suis de la même sensibilité que vous. Je reviendrai lire vos notes qui sont d'une grande qualité.
Fraternellement

klod a dit…

Merci (voir post et commentaires suivant...)

Anonyme a dit…

Je me méfie énormément de ce concept de "loi naturelle" dont les théologiens catholiques romains raffolent. Le problème n'est pas que la loi naturelle n'existe pas, mais que personne ne peut dire ce qu'elle contient, et que chacun la ramène donc à ses opinions, ce qui permet évidemment de leur donner à peu de frais une autorité qu'elles n'ont pas...

Paul fait effectivement allusion dans Rm 2, 14 à une sorte de loi morale gravée dans les coeurs et ayant survécu à la Chute. Qu'elle existe me paraît évident. Je ne connais pas un homme qui ne soit poussé à dire, de temps en temps au moins, "c'est injuste"... Et dès que l'on fait appel à ce concept d'injustice, on invoque un ordre normatif supérieur à l'expérience : les choses ne sont pas telles qu'elles devraient être ; tout ce qui est, n'est pas nécessairement bon. Et de fait, nous nous croyons tous en droit de passer des jugements moraux sur nos semblables, au nom de ce qui nous paraît "juste" ou "injuste". Et c'est tant mieux.

Mais j'ai une vision très, très pessimiste de ces versets. Il me semble qu'ils justifient le jugement de Dieu sur les païens - et que, vu le contexte, c'est bien ce que Paul avait en tête. Après avoir exposé la colère de Dieu contre la révolte de l'homme dans le chapitre 1, Paul essaye de montrer pourquoi le jugement de Dieu est justifié, non seulement contre les Israélites dépositaires de la loi, mais aussi contre les Gentils. Comment pourraient-ils être condamnés pour n'avoir pas suivi les ordonnances divines, s'ils n'en avaient même pas connaissance ? Réponse : ils sont jugés selon leurs propres critères, et condamnés par leur incapacité à les respecter. Le commandement de Dieu est d'être parfait, et ceux qui ont la loi peuvent être jugés pour ne l'avoir pas été. Le commandement de ce qui reste de loi morale en nous est d'être gentil avec grand'mère. Nettement moins contraignant, mais même cela, nous nous montrons incapables de le faire. Et en critiquant son voisin qui manque de charité avec ses vieux parents, le païen boit son propre jugement. En condamnant autrui au nom de sa propre loi, qu'il sait bonne dans son coeur, il s'admet lié par elle, et ses propres errances deviennent coupables. D'où la justice de Dieu à le condamner.

Je ne crois donc pas que la Bible enseigne que l'homme naisse "libre". Elle enseigne que l'homme naît et demeure esclave du péché, jusqu'à ce qu'il ne naisse de nouveau du Saint Esprit. Hors du Christ, la seule liberté de l'homme est de pécher. Même ce qui nous apparaît bon dans sa conduite n'est pas agréable à Dieu, car "sans la foi il est impossible de lui être agréable" (Héb. 11, 6). Quant à trouver en lui la ressource nécessaire pour exercer sa liberté de pécher, je ne doute pas qu'il y arrive fort bien. Et c'est là tout le drame de l'humanité corrompue.

klod a dit…

Je vous trouve sévère, mais peut-être est ce ma naïveté qui me perd...