Il y a-t-il comme le note Holzer (1) une véritable opposition entre la notion de mystère absolu (absolute Geheimnis), l'insaisissable et l'invisible par excellence décrit par Rahner la figure et la théologie biblique de la Gloire (doxa) d'Urs von Balthasar. Personnellement je ne le pense pas. Peut-être suis-je atteint d'un syncrétisme léger, mais il me semble que l'invisible est notre lot commun et que ce qui est dévoilé dans la figure, dans le Christ en croix, n'est finalement rien d'autre que l'insaisissable mystère, dont nous refaisons sans cesse la découverte et la perte. Certes le salut est là, mais il reste par sa kénose lieu de liberté et de choix... Tout le reste n'est que chemin, préparation, avancée douloureuse et fuite récurrente.
J'entends cependant les réserves de Balthasar dans Geist und Feuer qui se demande si lorsque "Rahner voit le caractère rédempteur et expiatoire de la mort du Christ dans l'acte par lequel Jésus en mourant s'abandonne totalement au Père" cela suffit (2). Je comprends qu'il puisse mettre ces réserves et cependant, je pense que si l'on ramène cette révélation à l'essentiel de ce qui peut générer une conversion du coeur, tout le travail du passé perd son acuité. Elle permet la conversion, mais est balayé par ce coeur offert et ouvert d'où coule le fleuve de la vie. Comment pourrais-t-on peser le reste à l'aune de cet instant décisif où tout prends sens ?
Certes, "la Gloire est la souveraineté éclatante de celui qui vient dans le monde" (3)
Il s'agit d'une présence au monde faite de signes sensibles, objet d'expériences vécues, racontées et interprétées selon un regard de foi. Mais pour moi l'épiphanie de la croix dépasse tout.
(1) Holzer, ibid p. 133
(2) Esprit et feu, 1976 p. 99
(3) Gloire et Croix, III/2 1 p.17
Balises : Balthasar Rahner kenose
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