31 mai 2005

Ecritures...

Ecrire revient à porter un jugement sur soi-même (1).
C'est un peu le sentiment que me procure ce blog. Un instant où en cristallisant mon dire, je m'expose à un jugement extérieur. Et cet exercice induit un cheminement qui peut-être fécond.
Comme le dit plus loin Balthasar, le jugement sur soi-même conduit à la mort sauf si un sentiment chrétien permet de dépasser cette auto-condamnation. C'est peut-être la voie qui s'ouvre à moi. M'exposer pour faire apparaître la faiblesse de mes actes comme de mes raisonnements et aller au delà...

(1) d'après Urs von Balthasar, ibid p. 385

Abandon - I

"Le mystère de ce Dieu puissant dont l'amour n'avait pas la possibilité de répondre au Fils abandonné sur la croix et criant vers lui, le mystère d'une faute incompréhensible mais partout présente entre le ciel et la terre" (1)
Cela reste pour moi effectivement le coeur du mystère mais aussi de l'espérance d'un sens. Car si l'abandon avait été total, nous n'aurions plus rien à espérer. Or justement, au delà de l'abandon, nous pouvons entrer dans l'acte de foi le plus essentiel, celui de croire que la mort et l'abandon ont été vaincus par la croix et que la résurrection est au bout du chemin...
Face à cela, il subsiste cependant une dialectique entre un Icare qui en cherchant à comprendre se brûle les ailes dans la démesure de sa raison ou le simple chemin fragile d'une interrogation pour le monde que l'on cherche à répondre...

(1) d'après Urs von Balthasar, ibid p. 368

Tragique...

Le tragique est un élément incontournable de nos vies... Mais notre société en refuse parfois la réalité, oubliant dans le présent et ses bonheurs fragiles l'implacable direction.
Le tragique habite nos vies, la mort nous guette et chaque pas nous prépare à cet acte ultime qui nous permettra à la fois de perdre le peu qui nous rattache à la terre et d'entrer dans le mystère du sens, de vibrer dans une nouvelle espérance

30 mai 2005

Abandon...

Je continue à me heurter à cette compréhension même de la déréliction, ce sentiment qui touche pour moi au mystère : "Le Christ a connut la souffrance de l'abandon. L'abandon au mal" nous dit Urs von Balthasar (1).

Qu'est-ce à dire ? Comment comprendre cela si ce n'est en pénétrant au coeur du mystère même de l'incarnation, c'est-à-dire d'un Christ qui veut souffrir la souffrance même de l'homme au plus profond de sa chair, de son esprit.
Il n'y a que l'espoir du Psaume 21, dans le "tu m'as répondu" qui suit le cri du "pourquoi m'as tu abandonné" que l'on peut trouver la trace d'une espérance. Et c'est peut-être dans cette espérance que l'on peut tracer un chemin pour notre foi.

(1) d'après Urs von Balthasar, ibid p. 367

29 mai 2005

Démesure (Hybris - II)

"Ce n'est que par une orgueilleuse démesure (hybris) qu'un homme pourrait prétendre saisir le sens qui renferme le tout de l'existence. Dans le bonheur ou le malheur, la réussite ou l'échec, il ne peut au mieux, qu'approcher ce sens à tâtons, par une croyance mais aussi en fixant de petits îlots de sens, il les verra s'enfoncer dans une mer infinie d'inexplicable." (1)

Ce qui rend vain toute l'hybris de nos discours, ces belles paroles ou nous en venons à croire que nous ne pouvons jamais atteindre le soupçon d'une vérité véritable...
Il y a comme dans ce blogue, un moment où l'on se heurte à l'indicible et où le silence serait peut-être plus parlant. Un silence qui comme Pascal s'efface petit à petit dans les actes, une charité nouvelle à inventer et vivre, dans le respect de ce qui nous échappera encore...

(1) d'après Urs von Balthasar, ibid p. 357

28 mai 2005

Ouverture de WikiKto

Je vous signale l'ouverture d'une encyclopédie libre catholique...
Quelques contributions de votre serviteur, pour un site au service de 'l'intelligence de la foi'...

Eve

"A côté d'Adam face au monde, il y a Eve pour donner sens à l'impossible" (1)
C'est peut-être là le secret de cette création d'ish et d'isha. Deux différences qui se penchent l'une vers l'autre et se faisant contribuent à une certaine fécondité que l'homme seul ne pourrait espérer atteindre. Penser seul c'est croire que l'on peut. Vivre à côté de, c'est travailler à un autrement...


(1) d'après Urs von Balthasar, ibid p. 347

27 mai 2005

Peur - II

Le Dialogue des Carmélites de Bernanos nous introduit dans la méditation de la peur naturelle de Blanche, qui est assumée dans la peur surnaturelle du jardin des Oliviers et insérée dans la communion des Saints où elle a sa place. (1)

C'est vrai que Blanche dans cette pièce admirable est profondément travaillée par la peur. Je n'avais pas fait le lien alors avec mes réflexions précédentes sur la peur de Jésus et sur le mystère même de cette incarnation. Dire que le Christ habite nos peurs et cependant les dépasse dans un Fiat, c'est insister sur le chemin, la voie tracée qui va de son agonie à sa mort et de la mort à la résurrection...


(1) d'après Urs von Balthasar, ibid p. 337-338

26 mai 2005

Le seuil

G. Marcel : "La mort de l'être aimé est un seuil et même le seuil".
Sans commentaires... On verra à ce moment là ?

(1) Cité par Urs von Balthasar, ibid p. 330

25 mai 2005

Vie et mort...

Fridolin Wiplinger : "Si je découvre dans l'amour mon être-moi que comme être-avec, ce devrait en être fini de celui-ci tandis que je continue de vivre physiquement. Dans son essence, l'amour est un amour jusqu'à la mort précisément parce qu'il est toujours incarné (...) Le caractère inconditionnel de l'amour personnel dans la pureté du "pour toi" en tant que but suprême de l'option de vie exige finalement de placer tout, c'est à dire la vie entière sous ce jour, de la prodiguer, de l'offrir et le cas échéant de l'abandonner. (...) Il est temps que les chrétiens s'arrachent enfin à la nuit métaphysique grecque impersonnelle "pour enfin peut-être commencer à avoir le regard libre pour l'être personnel de l'homme et une compréhension personnelle de sa vie, de son agonie et de sa mort, à partir de celle de Jésus Christ et de sa résurrection" Das Personal Verstande Tod (Fribourg/Br Munich 70)

Sans commentaires...

(1) cité par Urs von Balthasar, ibid p. 327

23 mai 2005

La mort - II

"S'il y a en moi une certitude inébranlable, c'est qu'un monde déserté par l'amour ne peut que s'engloutir dans la mort, c'est aussi que là où l'amour persiste, là où il triomphe de tout ce qui tend à le dégrader, la mort ne peut pas ne pas être en définitive vaincue." (1) On retrouve cette espérance du Cantique des cantiques : "l'amour est fort comme la mort". Je ne sais d'ailleurs, si depuis la résurrection du Christ, on ne pourrait pas traduire cette espérance de l'Ancien Testament en "plus fort que la mort"...
Cela fait revivre en moi les admirables pièces de Gabriel Marcel que sont L'Iconoclaste, Le Fanal, Le mort de demain...

G. Marcel cité par Urs von Balthasar, ibid p. 327

22 mai 2005

Salvifici Doloris - II (Le sens salvifique de la souffrance)

"Je complète en ma chair ce qui manque aux épreuves du Christ pour son corps qui est l'Eglise". Cette phrase de Paul qui introduit la lettre apostolique de Jean-Paul II donne le ton de toute la lettre.

L'idée centrale c'est que la souffrance est la rencontre entre un homme libre et le mal qu'elle que soit sa forme. Quelle que soit la forme de cette souffrance, se trouve "toujours une expérience du mal qui entraîne la souffrance de l'homme. Ainsi donc, la réalité de la souffrance fait surgir la question de l'essence du mal : qu'est-ce que le mal ?"" (§ 7)

Sur la cause du mal, Jean-Paul II souligne qu'il s'agit d'abord de l'absence d'un bien.

On a envie cependant de compléter, à ce stade, par la distinction thomiste entre "mal de peine" (tremblement de terre, maladie) et le "mal de faute" (mal causé par un tiers).
Cette rencontre avec le mal pose la question du pourquoi ? mais aussi du but (pour quoi ?). Alors que pour les amis de Job, cette souffrance semble justifiée par la faute, Job nous fait découvrir le travail de l'homme qui est un chemin de conversion. Déjà dans L'Ancien Testament, nous remarquons une tendance qui cherche à dépasser l'idée selon laquelle la souffrance n'a de sens que comme punition" (§12).
Mais pour comprendre le pourquoi, il faut nous tourner vers le Christ. La souffrance "doit servir à la conversion c'est-à-dire à la reconstruction du bien". (...) "Le Christ nous fait entrer dans le mystère et nous fait découvrir le pourquoi de la souffrance, dans la mesure où nous sommes capables de comprendre la sublimité de l'amour divin." (§ 13).
Le Christ apporte une lumière nouvelle, celle du salut. (§ 15)
Le Christ se fait proche de la souffrance humaine. (§ 16) et son enseignement et notamment les huit béatitudes trace un chemin hyperbolique qui montre que la souffrance participe à l'oeuvre du salut.
Jean-Paul II rejoint ici ce qui pour Hans Urs von Balthasar est le propre de la dramatique divine. Le Christ est au centre du drame, chemin de lutte contre le mal sous toutes ses formes. Chemin et victoire.
Or pour Jean-Paul II, le Christ prend sur lui cette souffrance. "Le Fils de même nature que le Père souffre en tant qu'homme. (...) Il se charge d'une manière totalement volontaire des souffrances" (§18), rejoignant la prophétie du Serviteur Souffrant (Isaïe 53, 5). La réponse du Christ à la souffrance est donc à la fois dans la Bonne Nouvelle mais avant tout par sa propre souffrance". C'est le langage de la Croix.
La souffrance c'est subir le mal mais c'est aussi une participation à l'amour.

Le mystère du mal s'inscrit donc dans le drame. Et comme le souligne Paul, lorsque je souffre "ce n'est plus moi qui vis, mais le Christ qui vit en moi. (§20).

On prend alors conscience du paradoxe de la faiblesse et de la force. Je ne peux répondre seul à la souffrance. Il y a un moment où seul Dieu peut l'assumer en moi (faiblesse) et en même temps, ce dé-centrement, ce sur-centrement en Christ me permet d'obtenir sa grâce (force).

Dans ma souffrance, je participe au drame. "Je complète en ma chair ce qui manque aux épreuves du Christ . Les souffrants s'inscrivent donc dans la communion des martyrs et des saints, dans le chemin de l'Eglise, celui qu'elle trace dans "l'Evangile de la souffrance . (§25) Ce chemin, Marie fut la première à le tracer, en complétant dans sa chair (comme elle l'avait fait dans son coeur) la souffrance de son Christ, en l'accompagnant sur le chemin du Calvaire.

Cette participation à la souffrance donne une "force particulière qui rapproche intérieurement l'homme du Christ, une grâce spéciale (§26). "Lorsque le corps est profondément atteint par la maladie (...) la maturité intérieure et la grandeur spirituelle deviennent d'autant plus évidentes, et elles constituent une leçon émouvante pour les personnes qui jouissent d'une santé normale .
Le souffrant accomplit ainsi un service irremplaçable et entre dans la communion de l'Eglise, au sein même du drame.

Jean-Paul II rappelle ensuite "la parabole du Bon Samaritain qui appartient à ce même Evangile de la souffrance. Elle indique, en effet, quelle doit être la relation de chacun d'entre nous avec le prochain en état de souffrance. Il nous invite à ne pas passer outre, à ne pas épargner nos moyens, notre coeur, comme nos moyens matériels, être capable de don, libérer en nous ses capacités d'aimer. Et Jean-Paul II rappelle la phrase du Christ : "C'est à moi que vous l'avez fait" (§29).

La relecture de ce texte à l'aune de la vie et de la mort de Jean-Paul II lui donne un sens tout particulier. On perçoit combien sa mort saluée par tant d'hommes et de femmes a tracé à sa manière l'Evangile de l'amour qui est pour reprendre ses propres mots l'Evangile de la souffrance.

Texte Intégral : http://www.vatican.va/holy_father/john_paul_ii/apost_letters/documents/hf_jp-ii_apl_11021984_salvifici-doloris_fr.html

La Mort - I

Le tragique se situe dans le choix entre une mort, évènement passif que l'on fuit ou un autre hautement actif que l'homme choisit délibérément en en fixant à son gré, l'instant la manière et le pourquoi. (1)
C'est à la fois l'instant le plus humiliant, celui où l'on sombre dans la pourriture et en même temps le plus noble si l'homme le prend comme un enjeu et un accomplissement de son existence...
Il n'y a, insiste Urs von Balthasar qu'un sujet véritablement dramatique, le choix de l'homme face à la mort.
On retrouve cette interpellation soulevée par Lévinas, dans ce que Sibony interprète comme l'interpellation ultime de l'homme face à la Scène... Celle où l'on doit choisir entre vivre coupable ou mourir pour l'autre. Mais est-ce que ce choix fondamental n'est pas ce à quoi nous devons nous préparer toute une vie. Etre prêt au don, si notre don n'a que cet instant pour être valide (ce qui reste d'ailleurs une question à méditer...).


(1) d'après Urs von Balthasar, ibid p. 310

21 mai 2005

Paul Ricoeur

"Le philosophe Paul Ricoeur, l'un des plus grands penseurs français de l'après-guerre, dont l'oeuvre considérable est mondialement reconnue, est décédé à l'âge de 92 ans, à son domicile près de Paris, a annoncé samedi un de ses proches..."

J'en parlais encore il y a deux jours. Je l'ai croisé il y a dix ans à la soutenance de thèse d'un ami, mais surtout dans ses livres...

C'était un grand, grand bonhomme...

Grâce ou liberté ?

"La libre victoire sur soi-même présentée d'en bas comme soumission, sagesse, renoncement est distinguée d'en haut comme effet de la grâce. Pour Calderon, il n'y pas de fatalité neutre mais seulement le oui et le non de la nature déchue par le péché héréditaire face à ce que saint Paul appelle les puissances du monde, et la saisie de la grâce salvatrice dans la soumission qui extérieurement se subordonne au destin mortel mais aussi le surmonte intérieurement." (1)

Probablement un peu compliqué à la relecture...
Ce que j'en retiens, mais il faut peut-être se replonger dans le texte, c'est que ce qui est bon en moi, ce que je travaille, de toutes mes forces, n'est vainqueur que lorsque j'abandonne ma volonté pour faire la sienne et que j'atteins ainsi une liberté véritable, créatrice, féconde. Au bord du gouffre de la démesure, tu me conduis vers les eaux tranquilles...

Il y a donc conjonction entre mon oui et la grâce reçue, qui s'harmonise dans une liberté nouvelle et créatrice...

(1) d'après Urs von Balthasar, ibid p. 309

20 mai 2005

La souffrance

Je viens de relire la lettre apostolique Salvifici Doloris, la valeur salvifique de la souffrance, Jean Paul II, 11 février 1984.*
Un texte d'une grande profondeur, qu'il est intéressant de relire à l'aune de la vie et de la mort de Jean Paul II.



* disponible sur http://www.vatican.va
voir lien direct dans le commentaire de Phil.

19 mai 2005

Liberté ou pulsion - II

" Sémirimis suit son destin mais ce qu'elle prenait pour une liberté n'est que pulsion.."

Le serf arbitre, encore...

(1) d'après Urs von Balthasar, ibid p. 307

18 mai 2005

Liberté et pulsion - I

"Le moi abandonné et rejeté de Dieu qui voudrait revenir à l'ordre saint, fondé en Dieu, mais se voit barrer le chemin par la faute originelle de l'existence et par la volonté qu'aveuglent les instincts ne peut que crier, dans l'angoisse et la misère, à une divinité qui n'est plus un sauveur : protège moi de moi-même " Benno von Wiese, à propos de l'Aïeule de Grillparzer dans Die Deutsche Tragödie von Lessing bis Hebbel, Leibzig p. 387

Cet appel païen peut cependant être relu, dit Urs von Balthasar, à l'aune de Jn 11,25ss : "Qui croit en moi, même s'il meure vivra..."
Et de fait, quand on s'échappe à soi-même, quand le serf-arbitre dont nous parle Luther et repris par Ricoeur dans la Philosophie de la Volonté est tel que nous perdons pied, il nous faut reconnaître ce que nous tardons toujours à admettre. Nous ne pouvons rien de nous-mêmes. Il est notre sauveur...


(1) d'après Urs von Balthasar, ibid p. 302

17 mai 2005

Notre place ?

N'est-ce pas au coeur de cette question que nous pouvons nous laisser interpeler par un autre.
Comprendre que notre vie n'est pas ordonnée par la simple servitude des forces intérieures qui nous habitent mais bien par autre chose...

Corps du Christ

Comme le souligne Urs von Balthasar*, on ne peut évoquer la question des rôles sans reprendre la position paulinienne, qui insiste sur la place de chacun dans le corps du Christ. Urs von Balthasar cite quelques textes éclairants à l'aune de nos réflexions des billets précédents. Je me contenterais de les aligner, à titre illustratif.

1 Co 7 (17,20,24) : "Pourtant, chacun doit continuer à vivre dans la situation que le Seigneur lui a donnée en partage, et où il était quand Dieu l'a appelé."
Rm 12, 3-6 : "n'ayez pas de prétentions déraisonnables, soyez assez raisonnables pour n'être pas prétentieux, chacun en proportion de la foi que Dieu lui a donnée en partage. (...) nous avons reçu des dons qui sont différents."
Eph 4,10 : "Les dons qu'il a faits, ce sont des apôtres, des prophètes, des évangélistes, des pasteurs et catéchètes, afin de permettre les saints en état d'accomplir le ministère pour bâtir le corps du Christ, jusqu'à ce que nous parvenions tous ensemble à l'unité dans la foi et dans la connaissance du fils de Dieu, à l'état d'adultes, à la taille du Christ dans sa plénitude. Ainsi nous ne serons plus des enfants, ballottés, menés à la dérive à tout vent de doctrine, joués par les hommes et leur astuce à fourvoyer dans l'erreur."

Notre rôle est donc à mesurer de manière relative, ce que nous avons souvent tendance à oublier lorsque nous construisons la tour de notre moi.

* Urs von Balthasar, ibid pages 297-8


Commentaires : Je signale, que la plupart des citations données ici sont issues de la traduction liturgique de la Bible ou de la TOB, en espérant ne pas abuser du droit de citation...

16 mai 2005

Responsabilité et liberté

Le principe de responsabilité nous interpelle au point que là aussi notre liberté de choix est limitée. Mais, la question se situe au-delà du simple questionnement philosophique.

Plus la situation est dramatique, plus notre liberté qui semble limitée est mise à mal par notre peur de la mort.

Conflit dramatique entre Eros et thanatos dirait le père Freud. Oui et non, puisque ici, plus qu'ailleurs notre sens éthique fondamental est en cause. Et face à ce choix, l'éclairage de notre conscience est plus que jamais nécessaire. Ce qui ne garantit en rien notre capacité de répondre oui à l'interpellation.

15 mai 2005

Le souffle de l'esprit...

"Le Seigneur n'était pas dans l'ouragan ; et après l'ouragan,
il y eut un tremblement de terre, mais le Seigneur n'était pas
dans le tremblement de terre ;
et après ce tremblement de terre, un feu,
mais le Seigneur n'était pas dans ce feu ;
et après ce feu, le murmure d'une brise légère.
Aussitôt qu'il l'entendit, Élie se couvrit le visage
avec son manteau,
il sortit et se tint à l'entrée de la caverne."

1 Rois 19 -11,13

Comment, en ce jour de Pentecôte, ne pas évoqué ce qui est pour moi un
des textes les plus subtiles de l'Ancien Testament.
On y perçoit la tendresse d'un Dieu que l'on croyait dans la puissance et qui ce révèle,
comme le suggère E. Lévinas dans le "bruit d'un fin silence".
Manifestation fragile de Dieu qui respecte notre liberté et s'incline à notre rencontre.

Mort et action... Face à la peur...

Dans "Jeux de massacres", Ionesco (*) semblent s'attacher aux comportements des acteurs face à la mort. Ici, la menace de mort a définitivement triomphé de l'action. Elle interpelle sur les limites du discours...

On peut toujours parler, faire de beau discours, mais comment serons nous face à la mort ? C'est sur cette question fondamentale que la construction intérieure de l'individu peut utile. Pour un chrétien cependant, on peut ajouter que toute attitude de foi repose sur notre espérance, celle du Christ ressuscité.

Il a vaincu la mort.


Sur cette base, nous pouvons fonder notre foi.
Et face à nos peurs, nous pouvons déposer nos limites au pied de cette croix victorieuse, élevée de terre pour donner un sens à nos doutes et nos espoirs. Comme les juifs qui ont vénéré le serpent d'airan dans leur marche au désert, nous fondons notre espoir sur cette évélation.
Que Dieu nous donne la grâce de dépasser cette peur.

* cité par Urs von Balthasar, ibid pages 287

Dieu aime tout homme

Une des plus grandes convictions de ma foi, c'est de croire que tout homme est aimé de Dieu.
Cet amour n'est pas un amour réducteur, mais un amour qui respecte fondamentalement la liberté de l'homme, au point de se mettre à genou devant son humanité, sans le forcer, sans le brusquer, mais en lui disant simplement, je crois en toi, je crois en ton humanité.

C'est ce qu'exprime le geste de Jésus, la veille de sa passion, lorsqu'il se met à genou devant Pierre, celui qui deviendra le pasteur de son troupeau :

"Tu vas me renier, Pierre, mais je me mets à genou devant toi. Je crois, qu'au delà de tes actes, il y a en toi un potentiel d'humanité"
. C'est pour moi le coeur de ma foi

14 mai 2005

Le visage de l'autre...

Le visage de l'autre est signe. Il nous interpelle par le regard, mais aussi parce qu'il y a au fond des yeux un être de chair, mystérieux, inaccessible que l'éclat du regard nous révèle à petites touches.
Se laisser toucher par le regard, c'est commencer un chemin d'ouverture.

Référence : Autrement qu'être ou au delà de l'essence, E. Lévinas

Jean Paul II - En voie de béatification

Je pense que Benoît XVI a été bien inspiré d'accélerer le processus de béatification de Jean Paul II alors qu'il reste bien présent dans nos mémoires.
Cela donnera peut-être à beaucoup la joie de découvrir la profondeur de son message à la fois philosophique, théologique et pastorale.

Quelques liens :

- Sur PMC, quelques ouvrages choisis.
- Regarder en Vidéo la messe des obsèques de Jean Paul II

13 mai 2005

Solitude

La solitude serait-elle commune à tout homme et ce jusqu'à la mort. Solitude foncière de l'homme qui malgré la course au relationnel traduit un manque de sens, de direction ?

La solitude serait-elle la faille dans le coeur de l'homme qui ouvre à la transcendance ?

Ou est-elle, comme le suggère Abel, une fuite du réel, un refus de s'engager dans la vie, une peur de l'autre...

12 mai 2005

Vide intérieur ?

Dans un monde qui est de plus en plus marqué par une recherche de l'instantané, on peut s'interroger sur une apparente absence de drame intérieur et sur l'existence de personnes qui en apparence ont perdu tout sens à leur vie. Cela appelle deux considérations.

1) Cette apparence de vide est probablement provisoire. Il peut être réel quand rien ne stimule l'homme à une réflexion intérieure, mais c'est ignorer que l'homme est par essence porteur d'un germe de l'Esprit et qu'il suffit d'une faille pour mettre à jour la vie intérieure qui sommeille.

2) Face à ce vide, on peut s'interroger sur l'intérêt de ré-introduire l'hyperbole.

Seul le langage hyperbolique peut en effet, à mon avis ouvrir une faille dans le coeur de l'homme en interpellant la personne dans un coeur à coeur. Cet appel à l'hyperbole doit se faire dans la limite du risque paradoxal d'introduire une idéologie ou un rêve ? Mais une chose est certaine. Quand il n'y a plus en apparence que le néant, seul l'hyperbole vient dépasser le marécage du quotidien. Est-ce un idéal ? Non. L'hyperbole est une direction vers quoi se tourner. Ce n'est ni une idéologie, ni une utopie mais plutôt une victoire, celle qui permet d'introduire l'espérance.

Quand on interroge Jésus sur un conflit d'héritage, il répond à côté. Mais il fait suivre sa réponse d'une parabole sur l'homme riche qui engrange son blé et va mourir le soir même. Le langage de Jésus est hyperbole...

Luc 12 : "Du milieu de la foule, un homme demanda à Jésus : « Maître, dis à mon frère de partager avec moi notre héritage. » Jésus lui répondit : « Qui m'a établi pour être votre juge ou pour faire vos partages ? » (...) Et il leur dit cette parabole : « Il y avait un homme riche, dont les terres avaient beaucoup rapporté. 17 Il se demandait : 'Que vais-je faire ? Je ne sais pas où mettre ma récolte.' Puis il se dit : 'Voici ce que je vais faire : je vais démolir mes greniers, j'en construirai de plus grands et j'y entasserai tout mon blé et tout ce que je possède. Alors je me dirai à moi-même : Te voilà avec des réserves en abondance pour de nombreuses années. Repose-toi, mange, bois, jouis de l'existence.' Mais Dieu lui dit : 'Tu es fou : cette nuit même, on te redemande ta vie. Et ce que tu auras mis de côté, qui l'aura ?' Voilà ce qui arrive à celui qui amasse pour lui-même, au lieu d'être riche en vue de Dieu. »

11 mai 2005

Témoignage

"Un témoignage, plus il est contradictoire, plus il est vrai !" Si l'on croit Urs von Balthasar (*), pour Ionesco, ce qui est original est vrai. "Ce qui est déjà pensé, déjà dit, n'est pas vrai..." Notre témoignage n'a de fait un sens que lorsqu'il n'est pas pensé mais implicite, non conditionné par une routine, un projet pédagogique. A tel point que pour moi le témoignage ne peut être cadré, prévu, inclus dans un programme pédagogique. La véritable pédagogie, en particulier pour des adultes sera plus de nature inductive, c'est-à-dire quand chacun apportant le meilleur de soi-même, partage, sans arrière pensée ce qui le touche au coeur.


* Urs von Balthasar, ibid page 279-80

10 mai 2005

Eucharistie - II

Cela ne nie pas que devenir temple du Christ n'est pas une valeur fondamentalement essentielle dans la vie d'un chrétien. Mais, si j'en crois ma modeste personne : ces instants d'intenses communions sont rares.

On peut répondre, et on aura raison que le travail de la grâce dépasse largement tout nos efforts d'humanisation.

Maintenir l'eucharistie régulière a du sens dans ce sens. Il permet de laisser à la grâce le temps de faire son chemin au coeur de nos individus enlisés dans nos contradictions.

Mais, parfois, je persiste à croire que casser le rythme permet de lui donner un sens. Autant la routine a l'avantage de maintenir l'homme dans une interpellation régulière, lui permet d'être porté par la présence, alors qu'il n'est pas présent, autant je pense qu'une rupture peut venir remettre en question la somnolence.

Cela aurait aussi un sens, le jour où l'Eglise lit le texte de la femme adultère. Je pense que ce jour là, si le prêtre peut inviter les fidèles à s'abstenir de l'eucharistie, en communion avec nos frères qui sont en situation de remariage, cela permettrait de faire prendre conscience à ceux qui communient sans souci, qu'il ne s'agit pas d'un droit mais de bien plus, que l'enjeu d'un faire mémoire de la passion douloureuse du Christ se situe ailleurs.

A méditer (et commenter...)

09 mai 2005

Eucharistie, morne plaine ?

La puissance signifiante de l'Eucharistie n'est-elle pas étouffée sous l'obligation dominicale, à tel point que de temps en temps nos dimanches ne sont qu'un rassemblement docile et sans lumière. Que faire ?
Je m'interroge. Ne serait-il pas opportun de réintroduire de temps en temps des jeûnes eucharistiques pour transformer le panurgisme dominical en un lieu de recherche de sens, d'intelligence de la foi. L'ardeur évangélique est-elle le lot des fidèles. Quand j'entends certaines histoires, je m'interroge. Où est la foi ? Quel sens ont nos messes ? Casser le rite pour en retrouver le sens profond, pour faire renaître le désir en lieu et place d'un conformisme social ?
Seul un homme vraiment libre peut être source de la lumière divine. Tout ce qui est réalisé par obligation, conformisme n'est que vide.
Si l'on construit trop vite une représentation dramatique à partir de l'esthétique on fige en icône la figure du Christ. Or le drame eucharistique n'est pas qu'une simple représentation qui fait mémoire. Pour qu'elle devienne lieu de présence, il faut lui permettre d'être la conjonction d'une démarche de foi, d'une démarche communautaire, mais aussi et surtout, le lieu d'un décentrement véritable qui se fait accueil de l'Esprit, sans lequel le sacrement ne peut être.

Inutile ?

Trouver un langage commun ?
Quand l'autre n'a rien à dire, quand on est face à une absence de points communs, on peut être effectivement interpellé par notre place, notre rôle. Difficile de mettre au point un discours, au point que peut réapparaître le sentiment d'être inutile...

Peut-être que de fait, le décentrement devient alors plus évident. Si je ne peux t'être utile, en apparence, laisse moi Seigneur être seulement signe de ta présence...

Hôtel Rwanda

En deux jours, la vision de cet excellent film sur le génocide africain et un documentaire, le 18 avril sur le génocide au Cambodge sont autant de coups de massue qui font prendre conscience de la fragilité d'un modèle, d'une idéologie. Comment l'homme moderne peut arriver à ce stade de haine et de violence ?
Cela serait un phénomène isolé, on pourrait trouver des excuses. Mais que le XXème siècle soit autant traversé par ces monstrueuses exterminations interpelle. D'autant que nos sociétés civilisées sont loin d'avoir les mains blanches.
Cela fait remonter en moi, cette autre émission vue sur Arte il y a moins de 15 jours, où l'on notait une correspondance troublante entre la lutte contre les insectes parasites et le nazisme. Le fait que le surnom des tutsis ait été les "cafards" n'est pas une coïncidence. Cela dénote les phénomènes inconscients qui contribuent à la montée d'une haine sourde et dangereuse. Est parasite tout ce qui vient troubler la quiétude de mon univers, envahit le confort de mon pays, ma culture.
Il ne faut pas être devin pour voir ce qu'une simple projection de ce sentiment sur la situation française pourrait générer dans un contexte de paupérisation de la France. Où va nous mener la délocalisation ? Probablement à une haine farouche, progressive envers cet étranger qui foule mon sol et vient prendre ce qui m'était dû, de par ma naissance. La dynamique morbide de l'avantage acquis est loin d'une volonté de partage, d'acceptation de l'autre dans sa différence. Et je ne parle pas de cette charité véritable, celle, bien difficile, qui peut considérer que seul un plus que partage équitable des richesses peut freiner la montée de la violence. L'amour ne cherche pas son intérêt... (1 Co 13)...
Tout cela reste bien complexe et je me garderais d'en tirer des conclusions hâtives. Il faut au moins, à défaut d'agir, ouvrir les yeux et quitter cet aveuglement stérile du français chauvin qui ne voit pas plus loin que son ventre... Quand je pense que l'on peut s'afficher chrétien et voter pour le FN... Belle prise de distance...

08 mai 2005

Conjonction

Comment ne pas souligner dans le travail réflexif d'une vie intérieure, ces conjonctions heureuses entre lectures, rencontres, pensées qui permettent d'avancer à petits pas dans le mystère, l'habiter et le faire sien.
J'y vois une trace discrète de la main de Dieu.
Gloire à Lui...

07 mai 2005

Unique ou quelconque ?

"Extérieurement chacun est remplaçable. Intérieurement chacun est unique" Ionesco (*). Cela interpelle et finalement rejoint une double problématique un peu paradoxale. On peut être inutile en soi, et le savoir permet de ne pas se croire responsable du bien que l'on fait. Mais cela ne concerne que moi. Quant à l'autre, le considérer comme inutile serait lui refuser son droit à être tout aimé de Dieu (ce qui est aussi valable pour nous)...


* cité par Urs von Balthasar, ibid page 277

06 mai 2005

Trinité - II

Dans sa description du metteur en scène, Urs von Balthasar reprend les propos de Ionesco qui souligne qu'il doit se laisser faire. "Il ne doit pas vouloir quelque chose de la pièce. Il doit s'annuler, il doit être un parfait réceptacle". Cela complète pour moi la métaphore possible de la place de l'Esprit-Saint, dans le théâtre de la Cité de Dieu, évoqué dans mon billet précédent (tout en maintenant les réserves déjà exprimées). L'Esprit Saint serait donc ce sourcier, ce médiateur qui régule les tensions pendant la répétition et lutte pour l'unité finale.

à propos de Urs von Balthasar, ibid p. 249

04 mai 2005

Décentrement - II

Le métier et l'existence du comédien nous offrent dans leur désintéressement, leur intime "caritatis" dont on parle en théologie avec en transparence la mission et l'existence du Christ qui est par essence existence eucharistique pour les autres, humble et transparente représentation du divin qui va au delà de la Vanité dans une soumission et un dévouement au rôle jusqu'à ne plus se jouer lui-même mais se soumettre au rôle. N'est-ce pas là le chemin d'un décentrement véritable déjà largement évoqué.


d'après Urs von Balthasar, ibid p. 244

03 mai 2005

Petit rôle - II (Humilité et exhibitionnisme)

Urs von Balthasar'1) reprends une phrase de L.Jouvet qui m'interpelle.

Il souligne la situation fragile de l'acteur, à mi-chemin entre exhibitionnisme et humilité "ne te prends pas pour le centre mais pour l'accident, le moyen, le filtre, le fil de communication"...

Cela souligne le petit rôle, déjà évoqué précédemment... Petit fil ténu mais pourtant unique.

(1) ibid p. 244

02 mai 2005

Masquer la lumière

C'est bien l'enjeu de toute représentation.
Soit l'on devient transparent de la lumière d'un autre et elle est lumière pour l'humanité, soit notre jeu notre parole en obscurcit la clarté et ce que nous réfléchissons masque justement cette clarté qui pourrait éclairer l'autre.

C'est peut-être la différence entre le pharisien et le publicain.
L'un croit être lumière et masque la source véritable.
L'autre sait ne pas l'être mais interpelle par son décentrement, par sa quête.

La difficulté est de ne pas sombrer entre l'écueil du pharisaisme et l'obscur pâleur de celui qui ne reflète plus rien...

01 mai 2005

Pharisien - III

Il y a souvent en nous cette tentation d'entrer dans "la routine d'un jeu [pharisien] qui reste vide comme les concepts sans intuition" (1). Ce que j'appelle la tentation permanente du fils aîné (cf. le Fils prodigue, Luc 15,25), celui qui se complait dans la routine d'une pratique, sans se laisser interpeller constamment par la Parole. Nous tombons sans cesse dans ce travers, au point de masquer par nos vies ternes et sans joies la lumière du ressuscité...


(1) d'après Urs von Balthasar, ibid p. 239

30 avril 2005

Pharisien - II

La limite du paraître peut en effet être rendue possible quand le recevoir intervient. Quand le paraître s'efface dans une filiation.
On parvient alors à une autre difficulté, celle de l'héritage.
On peut en effet sortir du paraître en s'affichant d'un autre, mais cet héritage est-il recraché, recopié, ou digéré, ruminé ?
C'est tout le travail intérieur qui est en jeu.
Un travail intérieur où l'écriture peut entrer en résonnance, en posant le dire dans le dit, mais non un dit qui s'efface, un dit qui se cristallise dans l'écrit.

Peut-être alors que le virtuel donne une nouvelle naissance au dit, dans la mesure où l'écrit même garde une légéreté, une progressivité, rendue possible par l'édition, la correction.

Une légèreté nouvelle que l'écrit traditionnel ne permettait pas...

29 avril 2005

Pharisien - I

Tout acte public est susceptible d'entrer dans l'ordre du pharisaisme.
C'est la plus grande difficulté d'une vie d'homme.
Peut-on échapper d'ailleurs à cette tentation du paraître ?
Peut-être que le seul chemin réside dans le décentrement.
Affaire à suivre

28 avril 2005

Trinité...

"La somme des acteurs individuels ne suffit pas pour incarner l'idéalité du drame dans son unité indivisible. Il y faut nécessairement une nouvelle instance qui fait passer l'unité idéale à l'unité réelle ; celle du metteur en scène. Son apport créateur est nettement distinct des apports créateurs de l'auteur comme de l'acteur : il concerne les transpositions de l'idéalité comme un tout dans la réalité de l'exécution comme un tout." (1)

Ce passage de Urs von Balthasar pourrait approcher le mystère même de la Trinité. On pourrait ainsi concevoir le Père comme l'auteur, le Fils, de même essence que le Père comme le premier acteur, médiateur de nos rôles à venir et l'Esprit comme le metteur en scène du théâtre de la Cité de Dieu au sein même du théâtre du monde.

Mais Balthasar met dans le son tome 2 de la Dramatique Divine (2)quelques limites à cette métaphore, même si elle reste en soi interpellante, petite image d'un mystère plus insaisissable du rapport entre Dieu et le monde...

(1) d'après Urs von Balthasar, ibid p. 216
(2) tome 2, préambule...

27 avril 2005

Rôle ou mission...

Dans la personne du Christ on touche au mystère entre le rôle imparti par le destin et la liberté de l'homme Dieu.
"Père non pas ma volonté mais la tienne".
"Que ta volonté soit faite..."



d'après Urs von Balthasar, ibid p.210

26 avril 2005

Rôle et auteur...

Luigi Pirandello, en publiant sa pièce "Six personnages en quête d'auteur" en 1921, vient mettre à mal le vieux sous-entendu du théâtre du monde où Dieu place les acteurs. Il le remplacer par un auteur humain qui devient dans la chaîne, l'instance responsable qui mène la pièce à son dénouement.

Face au supplice de ne pas pouvoir jouer le drame que l'on voulait jouer, Pirandello souligne la vision nietzschéenne d'un petit rôle, voir d'un néant. Mais cela renforce aussi l'idée d'une fragilité existentielle...

"L'existence n'a la consistance d'une essence que dans le rôle" note Urs von Balthasar à ce propos (ibid p. 203 et suivantes)

On retrouve là ce paradoxe de la fragilité de notre position, propice au décentrement, mais aussi le sentiment d'une responsabilité. C'est dans cette tension fragile qu'un chemin peut se construire...

25 avril 2005

Petit rôle

"Les pensées profondes se résument en aphorisme peu profond : banalité de la mort, de la naissance, du mariage tragi-comédie d'une petite pièce qui ne cesse d'être jouée." (1) Nous sommes plein d'assurance mais une fois le masque jeté c'est le plus faible qui apparaît.

Il nous faut prendre conscience de notre finitude, de ce petit rôle qui finalement ne nous distingue par sur l'immensité du temps et de l'univers malgré la place que nous cherchons à nous faire dans l'océan du monde. Tout en prenant aussi conscience que nous avons une place, irremplaçable dans le coeur de celui qui nous aime.

Paradoxe qui donne sa place à l'homme, entretient son désir tout en limitant sa gloire ?


'1) d'après Urs von Balthasar, à propos de Nietzsche, ibid p.198-9

24 avril 2005

Benoit XVI - Serviteur des serviteurs

En commentant l'homélie, Benoît XVI a rappelé le symbole du palium, cette écharpe qu'il porte maintenant au tour du cou : "la laine d'agneau entend représenter la brebis perdue ou celle qui est malade et celle qui est faible, que le pasteur met sur ses épaules et qu'il conduit aux sources de la vie. La parabole de la brebis perdue que le berger cherche dans le désert était pour les Pères de l'Église une image du mystère du Christ et de l'Église. L'humanité a nous tous est la brebis perdue qui, dans le désert, ne trouve plus son chemin. Le Fils de Dieu ne peut pas admettre cela ; il ne peut pas abandonner l'humanité à une telle condition misérable. Il se met debout, il abandonne la gloire du ciel, pour retrouver la brebis et pour la suivre, jusque sur la croix. Il la charge sur ses épaules, il porte notre humanité, il nous porte nous-mêmes. Il est le bon pasteur, qui donne sa vie pour ses brebis. Le Pallium exprime avant tout que nous sommes portés par le Christ. Mais, en même temps, le Christ nous invite à nous porter les uns les autres."
Puis en commentant la pêche miraculeuse, il a souligné l'importance symbolique de cette pêche : "Les Pères ont aussi dédié un commentaire très particulier à cette tâche singulière. Ils disent ceci : pour le poisson, créé pour l'eau, être sorti de l'eau entraîne la mort. Il est soustrait à son élément vital pour servir de nourriture à l'homme. Mais dans la mission du pêcheur d'hommes, c'est le contraire qui survient. Nous, les hommes, nous vivons aliénés, dans les eaux salées de la souffrance et de la mort ; dans un océan d'obscurité, sans lumière. Le filet de l'Évangile nous tire hors des eaux de la mort et nous introduit dans la splendeur de la lumière de Dieu, dans la vraie vie.".
Voir le texte de son homélie

Non pas ma lumière...

"le nouveau Pape sait que sa tâche est de faire resplendir devant les hommes et les femmes d?aujourd?hui la lumière du Christ : non pas sa propre lumière, mais celle du Christ." (1)

Cela traduit pour moi la profonde filiation de notre pape avec Balthasar dont je vous parle depuis plus d'un mois. C'est la kénose qui est en jeu ici. Le décentrement véritable. En affirmant ce décentrement, Benoît me donne espoir...

Son homélie insiste par ailleurs sur l'Eucharistie, qui n'est rien pour moi sans le lavement des pieds, ce qu'il souligne ainsi par cette attitude respectueuse.

De plus, son attachement à l'effort pour l'unité des chrétiens est un signe...

Beaucoup d'espoir donc...


(1) Première Homélie de Benoit XVI aux cardinaux...Texte intégral

Hyperbole - II

Peut-être faut-il revenir sur le terme d'hyperbole...
Il s'agit pour moi de cette capacité de réveiller le désir enfoui au plus profond de la personne humaine. Le désir dans la conception donnée par Denis Vasse qui distingue désir et besoin est cette capacité intérieure à vouloir le bien : le désir de voir Dieu ?

Par son message, par ses paraboles, mais aussi par son silence, le Christ nous invite plus loin, plus haut. Et c'est dans ce mouvement ascendant que notre désir peut être emmené.

L'hyperbole est la capacité de décoller dans ce désir...
Il reste chemin, c'est-à-dire invitation discrète, qui respecte cette délicate liberté de l'homme.

Quand je parle de l'hyperbole à propos des Béatitudes, c'est en souvenir de La Loi de Dieu, d'une montagne à l'autre, de P. Beauchamp, qui montre bien commment le Christ, dans son "heureux les pauvres de coeur" emploie ce langage hyperbolique et peut-être aussi eschatologique qui permet de voir la direction sans pour autant effacer la misère du moment. C'est une invitation, mais quelle invitation...

23 avril 2005

Liberté

"la liberté est toujours proche mais si tu veux t'en saisir avec raideur, la voilà loin. A peine t'inclines-tu doucement qu'elle est là de nouveau. Elle est secrète et n'admet pas de nom terrestre." (1).

Fragile liberté. Peut-on d'ailleurs la thématiser ? Elle est aussi fragile de par la puissance de nos propres déterminations, de nos culpabilités maladives, de la pression de l'autre et de notre moi. Mais elle est. J'y crois, à défaut de quoi, tout s'effondre et la vie perd son sens. Nous ne serions que des marionnettes du destin.

Comme le souligne Schelling, la liberté de choisir entre l'amour et le fond sans amour est au coeur même de notre existence. Si nous n'avions pas cette liberté nous ne serions que des marionnettes.



(1) in Hoffmansthal Dramen 314 Le grand théâtre de Salsbourg, cité par Urs von Balthasar, ibid p. 149

22 avril 2005

Hyberbole

L'hyperbole christique, cette invitation aux choses nouvelles qui se cristallisent dans le serment sur la Montagne et le pari fou des béatitudes, mais aussi dans le chemin douloureux d'un amour qui subit et porte le poids de la violence humaine, se heurte au mal. La question fondamentale est de savoir si face à ce mur, l'hyperbole peut introduire une fissure ? C'est à la fois mon expérience intérieure, quand le contact de la Parole fissure ma propre tour et mon espérance fondamentale de chrétien.

21 avril 2005

Idéal

Le coeur d'une réflexion intérieur, d'un discernement, ne repose-t-il pas dans ce conflit intime entre notre idéalité et sa réalisation pratique en ce monde ?

L'idéal nous fait courir, éveille notre désir, mais le réel nous heurte de plein fouet.
Travailler vers une résignation, un renoncement dit Denis Vasse dans l'Autre du Désir, c'est avancer sur le chemin où l'on s'en remet à Dieu, seul objet de désir véritable...

20 avril 2005

Un jeu libre...

"Ce n'est pas Dieu qui joue avec le monde, c'est le monde qui joue lui-même". (1)

Dieu joue-t-il d'ailleurs ? Non, le plan de Dieu n'est pas un jeu, même s'il fait un pari fou sur l'humanité...
(1) Urs von Balthasar, ibid p.141

19 avril 2005

Habemus papam...

On est parfois dérangé par le souffle... (moi compris)

Un chemin de décentrement comme un autre.
Mais aussi un lieu d'espérance...

Que Dieu protège Benoît XVI et conduise l'Eglise sur les chemins
qu'il a choisi, au delà de nos espérances,
dans le temps qui est le sien...

L'Eglise d'aujourd'hui n'est pas celle d'hier.
Tout reste à inventer.

L'unité prime...


Extrait de sa dernière homélie :
[Prendre]la « mesure de la plénitude du Christ », à laquelle nous sommes appelés à parvenir pour être réellement adultes dans la foi. Nous ne devrions pas rester des enfants dans la foi, comme des mineurs. En quoi consiste être adulte dans la foi ? [... athéisme, vague mysticisme religieux, agnosticisme,syncrétisme ]

Nous avons une autre mesure : le Fils de Dieu, l'homme véritable. C'est lui la mesure du véritable humanisme. Une foi qui suit les vagues de la mode n'est pas « adulte ». Une foi adulte et mûre est profondément enracinée dans l'amitié avec le Christ. C'est cette amitié qui nous ouvre à tout ce qui est bon et nous donne le critère pour discerner entre le vrai et le faux, entre l'imposture et la vérité. C'est cette foi adulte que nous devons faire mûrir, c'est vers cette foi que nous devons guider le troupeau du Christ. Et c'est cette foi, seulement la foi, qui crée l'unité et se réalise dans la charité."

Texte intégral

18 avril 2005

Tours - I

"Ils s'enfoncent tellement dans leur jeu qu'ils ne peuvent sortir de leur rôle". On retrouve ici la notion de tours, de ces tours d'orgueil que nous construisons sans cesse (avec ou sans blogs :-) et qui constituent notre apparence. Le vent souffle pourtant ailleurs, quand on a descendu les marches de l'apparence pour vivre dans la fragile nudité d'une exposition au vent de l'Esprit. C'est bien cela la conscience éclairée, qu'évoque Jean Paul II dans Veritatis Splendor.

(1) d'après Urs von Balthasar, ibid p. 119

17 avril 2005

Marionnettes

Dans les tragédies, l'homme qui souffre est élevé comme un ostensoir. (1) Sommes nous de simples marionnettes ? La vie est-elle un jeu pour autant qu'il reste une imitation, une mimesis comme le souligne Platon dans la Répubique, qui souligne notre propension à imiter les Dieux ? Notre vie qui nous vient de Dieu est-elle conduite par lui (l'amour), le véritable moteur ? Sommes nous de simples marionnettes pour l'amusement des dieux ou est-ce que nos actes ont un but sérieux dans l'existence du monde ? Est-ce que le sérieux de nos vies vient de nous, ou recevons nous un rayon du sérieux éternel ? N'y a-t-il pas ici une poésie, une esthétique d'une église à construire ou chaque acte d'amour est au service de l'édification d'une cathédrale humaine qui pointe sa nef vers l'Eternel.
Nous sommes des baptiseurs. Et notre spectacle dans le monde est au service de cette cité de Dieu, dont la véritable image reste à venir, mais dont nous pouvons ébaucher par petites touches de couleur, les fondations fragiles, conduits et éclairés par le souffle de l"Esprit.
Il s'agit bien d'ailleurs d'un éclairage... Cette lumière qui donne un sens et finalement nous permet d'accéder à la lumière véritable et à une joie qui dépasse tous les bonheurs...

(1) Ibid...

16 avril 2005

Toutes choses nouvelles - II

"Dieu nous a exposés, nous les apôtres, à la dernière place, comme des condamnés à mort : nous avons été donnés en spectacle au monde et aux hommes. Nous sommes fous à cause du Christ, mais vous vous êtes sages..." (1 Co 4,9)
Cette citation reprise par Balthasar (ibid p. 110) m'interpelle. Et si le sacrement avait ce sens, d'être spectacle pour le monde, à mi chemin entre le rôle, la mission, la liberté et l'obéissance, signe fragile d'une réalité invisible, petit scandale, image du scandale véritable, d'un amour fou qui renverse tout les a priori, les jugements tout fait et fait éclater l'amour sur le bois de la croix, signe de la croix glorieuse, couronnée de gloire. Ce n'est que dans cette dynamique que tout prend sens...

15 avril 2005

Dramatique... - I

"Du fait de la liberté de l'homme, Dieu se trouve dès le premier moment de la création engagé dans le monde ; il y a ainsi dès lors une dramatique entre Dieu et l'homme. Le fondement de cette dramatique ? L'homme est sans être interrogé, placé sur la scène du monde. " (1)

Qui suis-je ? Si ce n'est une étincelle de vie dans un tourbillon d'infini. Qu'est-ce que cette étincelle ?
Que vais-je éclairer ?
Vais-je éclairer ?

Oui est-ce que le vent de terre va éteindre ma flamme... ?

(1) Balthasar, ibid 104-105

14 avril 2005

Je fais toutes choses nouvelles... - I

Qu'est-ce que signifie cette phrase chuchotée par le Christ sur son chemin de croix dans le film de Mel Gibson...
Qu'est-ce que la nouveauté profonde si ce n'est un innocent qui porte et subit le poids de la violence humaine, parce qu'il croit qu'il y a là un chemin de vie, un signe véritable de l'amour...