Comment l'expérience de Dieu se manifeste-t-elle en l'homme ?
Comment la liberté est elle laissée à l'homme face à l'infini de Dieu ?
Quelques éléments de réponse :
Pour J. Morroux, l'expérience chrétienne peut être de trois ordre :
a) l'expérience empirique
b) l'expérimentale
c) l'expérientielle...
Comment expliquer cela. Cela repose d'après Ratzinger sur plusieurs notions (1).
Chez Aristote on trouve que rien ne peut entrer dans l'intellect s'il n'est d'abord entré dans les sens.
A l'inverse chez Platon, rien n'est perçu sans une intellection préalable. Nous interpellons la nature (c'est pourquoi Heidegger parle de "mise en demeure").
La découverte expérientielle ou expérience existentiale serait d'assumer le principe spirituel tout en lui laissant la liberté. En cela l'autre est laissé libre
"Ce n'est que par le renoncement à toute expérience partielle que se donne à nous la totalité de l'être. Dieu a besoin de vases vides de tout intérêt personnel pour y infuser son essentiel désintéressement." (2)
Cela a pour moi des conséquences importantes : "l'éducation qui veut mener à une expérience religieuse dans la vie de l'homme telle qu'elle se présente restera sans résultat, si elle n'est pas dès le début une éducation au renoncement" (3)
"Bienheureux ceux qui ont le coeur purs car ils verront Dieu (Mt 5,8).
Pour les Pères de l'Eglise poursuit Ratzinger, voir Dieu, le connaître "dépend de la purification du coeur, ce qui signifie un processus global dans lequel l'homme devient transparent, ne reste pas enfermé sur lui-même, apprend le libre don de soi et devient par là-même un "voyant". Du point de vue de la foi chrétienne, on pourrait exprimer cela de la sorte : l'expérience religieuse, au sommet de l'exigence chrétienne a le caractère de la croix. Elle comporte ce qui est la marque fondamentale de l'être humain : le dépassement de soi. La croix libère, elle donne d'être voyant" (4)
Dans le billet précédent nous cherchions où se trouve l'infini de Dieu. Peut-être peut-il apparaître de bien des manières, mais ces apparitions ne prennent leur ultime lumière que lorsque le voile se déchire (Marc 15,38 - katapétasma) de haut en bas. Tout nos efforts et nos "bonnes nouvelles" sont fragiles s'ils ne conduisent pas, s'ils ne préparent pas à la révélation de l'amour d'un Christ nu et exposé sur une croix. Ne pas croire cela, c'est refuser deux mille ans de tradition qui voit en Christ l'unique médiateur. Le mystère glorieux de la Croix domine et transcende toute catéchèse. Et s'éloigner de cette annonce, c'est masquer l'essentiel. Cela ne veut pas dire que nous devons brandir la croix à quatre vents, mais cela sous-entend qu'une pastorale qui fait l'impasse de la mort ET de la résurrection du Christ est une pastorale qui ignore l'essentiel.
(1) ibid p.388
(2) Hans Urs von Balthasar, in Gottesfahrung biblisch und patristisch
(3) d'après J. Ratzinger, ibid p. 388 à 392
(4) ibid p.393
Sur le même sujet : Expérientiel Liberté Croix Ratzinger Médiateur
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